[3+1 livres] Est-ce que vous aussi, vous savez cuisiner ?
Où on parle de cuisine pour débutants, de cuisine française traditionnelle et d'accords de saveurs
Cette newsletter vous a été transférée ? N'hésitez pas à vous abonner ici pour recevoir les prochaines dans votre boîte de réception !
Bonjour à tous et à toutes !
Ca faisait longtemps que je n'avais pas fait un [3+1 livres] ! Pour rappel, cette rubrique me permet d'aborder une petite partie de tous ces livres de cuisine que j'ai trouvés dignes d'être partagés avec vous pour une raison ou une autre, mais dont je n'ai pas forcément fait les recettes. Ceci dit, j'ai quand même testé 2 livres sur les 3 d'aujourd'hui !
Vous verrez qu'on a un petit fil rouge aujourd'hui, autour de la cuisine française du quotidien et ce que ça signifie de savoir cuisiner.
Allez, on y va 😊
Si vous savez faire ces 30 plats, vous savez cuisiner.
Voyons qui d'entre nous sait cuisiner avec A la fin de ce livre, vous saurez cuisiner ! d'Elisabeth Guedes
Je me suis intéressée à ce livre en raisonnant à l'envers : je ne l'ai pas emprunté pour savoir cuisiner à la fin du bouquin, mais pour vérifier si je savais déjà cuisiner 😅 En gros, est-ce que je maîtrise les plats de base proposés par le livre ? Et question sous-jacente encore plus intéressante : quels plats devrait-on savoir faire si on ose affirmer "je sais cuisiner" ?
Le livre comprend une trentaine de plats avec à chaque fois une recette classique et 3 variantes. Ces dernières jouent sur les ingrédients, notamment le type de protéines - viande, poisson ou végétales, et les inspirations - française ou cuisine du monde. Je vous donne la liste exhaustive :
La soupe
L'omelette
La salade composée
L'œuf cocotte
Le bowl
Le cake salé
La quiche
Le croque-monsieur
La pizza
Le burger
La galette
Les pâtes
Le risotto
Le one pot
Le wok
La poêlée
Les boulettes
Le curry
Le farci
Le mijoté de viande
La blanquette
Le tajine
Les lasagnes
Le gratin
Le parmentier
Le gâteau au yaourt
La tarte sucrée
Le cookie
La mousse
La crème dessert
Alors, vous savez en faire combien dans la liste ? 😄 Et combien de plats pouvez-vous faire sans même regarder une recette sur Marmiton ou dans votre bouquin favori ? Vous pouvez répondre sur le sondage en lien ci-dessous.
Je vous préviens, seules les personnes qui savent faire plus de 25 plats de la liste seront autorisées à rester abonné(e)s à cette newsletter. Roooh je plaisante ! Surtout qu'il n'y a pas si longtemps, je n'avais jamais fait de cookies de ma vie... 😅
En tout cas, me voilà rassurée pour ma pomme, j'ai déjà fait et réussi au moins une fois tous les plats de la liste ! Ouf, je crois que je sais cuisiner 😄
Comment s'en sortent nos compatriotes, sinon ?
D'après ce sondage Ipsos, 80% des Français(e)s interrogé(e)s savent faire des crêpes, 69% la quiche lorraine (mais avec une pâte maison ou pas ? Le sondage ne le dit pas), 51% la blanquette de veau, et seulement 24% une soupe de poisson.
Là où ça m'a amusée, c'est de voir quels plats ont été choisis. Une soupe de légumes ou un gratin dauphinois ? Ca, d'accord, pas de surprise. Par contre, un burger, un one-pot pasta avec du quinoa, ou un bowl avec des crevettes et de la mangue ? On est bien dans un livre publié en 2020. Et certes, la présence de tajines et de nombreuses recettes "à la thaï" ne m'étonnent pas - ils étaient déjà présents dans mes vieux Larousse de 2010. Mais voir des recettes de keftas, de shakshuka, ou d'aubergines à la libanaise témoignent d'une certaine tendance... Vous savez, ça commence par Otto et ça se termine par lenghi, ça vous dit quelque chose ? 😁 Alors, on parie que les keftas seront un jour aussi populaires qu'un couscous ?
Et vous, vous en pensez quoi de cette liste, y a-t-il des plats que vous auriez ajoutés ou qu'au contraire, vous n'auriez pas mis ? N'hésitez pas à dire en commentaire !
***
Enfin, je trouve ça amusant de penser aux plats qu'on mange au quotidien vs. ce que le reste du monde croit que nous les Français(e)s, on mange.
Il y a un tel décalage entre d'un côté, la cuisine de tous ces livres de basiques, et de l'autre, la cuisine française idéalisée à l'étranger, que ça en devient presque comique. D'un côté, j'ai l'impression que le monde entier a cette image d'Epinal : des plats ancestraux qui mijotent pendant des heures... Et de l'autre, quand je repense à que j'ai mangé lors de dîners à la maison, c'était plutôt des plats qui se rapprochaient de ceux du livre d'Elisabeth Guedes. Des cakes salés, des salades composées, de la viande de boeuf poêlée en 5 minutes avec un mélange d'épices tout prêt... Mais un filet mignon aux pommes ou une paupiette de veau ? Jamais de la vie. Quant à moi, qu'ai-je servi à mon compagnon la première fois qu'il est venu manger chez moi il y a plus de dix ans ? Eh bien, c'était un tajine aux abricots secs 😄 (p 124 dans le livre)
Si seulement le monde entier savait... Mais bon, autant les laisser nous garder sur un piédestal fait de boeuf bourguignon et de coq au vin 😄
Et puisqu'on parle d'image d'Epinal et de plats qui mijotent...
Ma cuisine française idéalisée
A propos des Routiers, les meilleures recettes d'Isabel Lepage
J'adore la cuisine française traditionnelle.
Je pense que ça tient pas mal à mes souvenirs d'enfance et d'adolescence, lorsqu'on partait sur la route avec mes parents. C'était une fête que de manger tous les jours dehors, dans des troquets sur le bord de la route, des petits restos mignons dans de jolis villages... J'en ai raconté une anecdote ici, mais plein de souvenirs de plats de restos sont restés ainsi gravés dans ma mémoire.
En marge de cette newsletter, j'ai feuilleté un paquet de livres de recettes, mais plus pour moi, à la recherche d'une espèce de saint-graal de la cuisine française traditionnelle. J'ai aussi regardé dans les bouquins de cuisine de bistrot, ou spécialisés dans les recettes d'antan, ou que sais-je. Et parmi tous ces ouvrages, ce n'est pas un livre de grand chef ou un livre réédité 20 fois qui m'a le plus marquée. Non, mon préféré est un livre mi-de recettes, mi-photographique, qui porte sur... Les relais routiers. Il s'intitulé tout simplement Les Routiers, les meilleures recettes, et est signé Isabel Lepage.
***
Déjà, le livre a un charme fou, en grande partie grâce au travail du photographe Laurent Grandadam.
Avec mon compagnon, on s'amuse beaucoup à retrouver dans le cinéma japonais ces images idéalisées du pays du soleil levant : des petites villes en bord de mer, des échoppes figées dans le temps, des enfants adorables et toujours très sages, même quand ils sont soi-disant turbulents...
Au même titre qu'un film de Kore-Eda pour le Japon, Les Routiers est une belle image d'Epinal pour notre pays. Et je le dis dans le meilleur sens du terme. Ici une cuisinière qui goûte attentivement son plat, là de belles et grandes tablées de clients, un patron qui sert une bière en rigolant... Page après page, je me suis laissée gagner par les sourires pris sur le vif, l'effervescence des lieux, ces plats sans façon mais qu'on devine délicieux, et qui me rappellent tant ce que j'ai pu manger pendant mes vacances d'enfance. C'est un plaisir que de plonger dans le quotidien de la vingtaine de restaurants routiers présentés, superbement capturé dans ces photos joyeuses et vivantes.
Et évidemment, j'ai beaucoup aimé les recettes. On est bel et bien dans une cuisine traditionnelle, souvent teintée d'accents régionaux. Des plats appétissants, généreux, mais avec un quelque chose de plus... Quelque chose de l'ordre du réconfort, mais un réconfort presque nostalgique. Oui, c'est le bon mot. Ces plats me rendent nostalgique. Car qui de ma génération cuisine encore du "petit salé" (p 124), des "diots dans une sauce au vin blanc" (p 108) ou un "suprême de volaille à l'angevine" (p 32) ? Alors qu'il me suffit juste de les écrire pour avoir immédiatement en bouche la saveur de ces plats ?
Finalement, ce livre, c'est un peu ma cuisine française idéalisée à moi. On y croise des quiches en tous genres, du pâté en entrée avec des cornichons sur le côté, et de bons plats en sauce. C'est une cuisine faite de "jambon persillé à la moutarde à l'ancienne" (p 92) et de "carré de porc aux deux mirabelles" (p 82)... Mais aussi de desserts joyeusement kitsch, comme une "aumônière banane-chocolat" (p 92) ou "une fraise Melba" (p 142).
Quant aux recettes elles-mêmes ? Franchement, rien de compliqué. Chaque restaurant présente 3 recettes qui tiennent toutes sur une page, ingrédients (peu nombreux) compris. Si on parle des plats principaux, une bonne partie sont une déclinaison de : faire revenir la viande dans du beurre ou de l'huile, déglacer avec du vin ou un autre alcool, gratter les sucs, ajouter les éléments de la sauce, laisser mijoter et voilà ! Ah mais tiens, c'est pas ce j'ai appris à faire à l'école de charcuterie ? Tout se recoupe finalement ! 😄
Bref, si vous aussi vous avez un faible pour ces bons petits plats, n'hésitez pas à craquer pour le livre !
Résoudre un mystère de la cuisine créative : les associations de saveurs
A propos de Mon premier livre de Food Pairing de Linda Granebring
Les premières années quand je regardais Top Chef, j'étais fascinée par le talent des candidat(e)s à associer des ingrédients ou des saveurs - bon, parfois de manière absconse, il est vrai...
Finalement, comme pour beaucoup de choses, il n'y a ni mystère, ni magie. C'est du travail de recherche. Des connaissances qu'on stocke dans la mémoire de son palais. De l'inspiration puisée à droite à gauche. Et surtout, beaucoup de pratique.
Mais si comme moi, vous n'avez pas de patience aimez apprendre vite, le livre de Linda Granebring sera un bon moyen de vous approprier rapidement des accords de saveur.
***
Food Pairing propose ainsi 80 recettes d'accords à partir d'un fruit ou un légume. Pour vous donner une idée, la carotte est déclinée de 3 manières :
Carotte + coriandre = salade cuite et crue, yaourt à la coriandre
Carotte + pois chiche = houmous à la carotte
Carotte + noisette = carottes rôties, tapenade noisettes-câpres
Ca donne un ouvrage vraiment lisible, en mode hyper efficace, et très pratique à utiliser. Les ingrédients sont classés par ordre alphabétique, donc on s'y retrouve facilement. Le sommaire est un modèle de lisibilité couplé à une jolie esthétique - voyez ci-dessous. La mise en page aérée et claire met encore plus en valeur les accords proposés. Bref, Food Pairing est l'un des livres de cuisine les plus faciles à prendre en main que j'ai eu l'occasion de découvrir depuis le début de la newsletter.
Quant aux accords de saveurs, rien de tiré par les cheveux. Le livre présente des accords raisonnablement classiques, et surtout, qui fonctionnent bien. Citons par exemple une "compote de prune et poivre noir", une "courge grillée et un beurre noisette à la sauge", ou encore "un velouté de betterave au gingembre".
Le type de plats ? Des salades, des veloutés ou des soupes glacées, des légumes et des fruits rôtis... Et à part quelques recettes, qui demandent par exemple du curcuma frais ou de la ciboulette avec des fleurs, la vaste majorité des plats sont faisables avec des ingrédients courants et sont exécutés en quelques étapes à peine. Les recettes sont donc très simples.
Ceci dit, il ne s'agit pas d'une simplicité un peu plate, pour cuisiner rapide et facile, mais d'une simplicité qui fait sens. Déjà, elle sert le propos du livre : on cherche à mettre en valeur les accords, point barre, donc pas d'effet de manche niveau technicité. Mais cette simplicité est aussi le reflet d'une cuisine épurée dans l'air du temps. Une soupe glacée de rhubarbe avec du sirop de sureau, une salade d'agrumes au zaatar... Je n'aurais pas été étonnée de découvrir ces plats d'une élégante concision à la carte d'un restaurant Fooding-approved.
Et il est vrai qu'il ne faut parfois pas grand chose pour faire une bonne assiette, comme le souligne l'autrice dans la recette la plus simple du livre, la compote crue de myrtille et citron vert (p 112). Vous écrasez des myrtilles fraîches avec du sucre et du jus de citrons verts. Vous ajoutez un peu de zeste et des myrtilles entières. Vous accompagnez éventuellement cette compote de yaourt grec à la vanille. Et voilà. Vous avez un très bon dessert.
***
Mais bon, comme la vie n'est pas parfaite, je n'ai testé qu'une seule recette du livre, et pas de bol, c'était pas complètement concluant. Déjà, j'ai choisi une recette de crumble, qui est un dessert que normalement je déteste faire. Pourquoi j'ai voulu me faire du mal, me demanderiez-vous ? Eh bien, c'était un jour où j'invitais un pote à la maison, et je ne voulais surtout pas me prendre la tête avec le dessert. Donc je me suis dit qu'un crumble, c'était facile, ça passerait crème...
Sauf que. Déjà, quand j'ai vu les proportions du livre, j'ai tiqué : 400g de farine + 300g de flocons d'avoine + 100g de sucre roux + 125 g de beurre ? C'est pas un peu beaucoup de matière sèche par rapport au beurre, ça ? Au début, j'ai suivi consciencieusement la recette, mais c'était beaucoup trop farineux et pas assez sucré. J'ai fini par doubler les quantités de beurre et de sucre, et après cuisson, je me suis retrouvé avec un crumble, disons, acceptable.
Donc déjà, je pense qu'il y avait un souci de proportions. Mais surtout, il y avait beaucoup trop de crumble par rapport à la quantité de poires ! J'avais divisé par deux la quantité de farine/flocons d'avoine, et il m'en est resté pour un régiment entier. Alors que la compote de poires, faite avec 550 g de poires qui ont beaucoup réduit à la cuisson, n'a duré que le temps d'un dîner pour 3 personnes...
Bref, morale de l'histoire : si vous vous forcez à faire un plat que vous n'aimez pas, il y a des chances que celui-ci se retourne vous 😅
Les proportions d'autres recettes du livre m'ont aussi interrogée. Exemple, une salade d'asperges vertes où on mélange 400 g d'asperges avec le jus d'un citron, une cuillère à soupe de vinaigre, mais une seule cuillère à soupe d'huile d'olive, et carrément une botte entière de menthe - certes petite, nous dit le livre, mais une botte entière quand même ? C'est une salade de menthe à l'asperge ou quoi ? 😅
Par contre, l'idée de mélanger asperges, pistaches, citron et menthe, ça, ça me plait beaucoup ! C'est pourquoi je vous recommande quand même volontiers le livre, malgré le crumble chelou et mes réserves sur certaines recettes. Certes, il faudra peut-être adapter les quantités de ces dernières. Mais au moins, on peut compter sur le livre pour aisément trouver l'inspiration et nous appuyer sur des accords qui fonctionnent. Et ça, c'est déjà pas mal.
[C'est le moment où vous allez me détester, parce que le livre est épuisé et vendu sur certains sites en occas' à des prix astronomiques. Mais je l'ai trouvé en bibliothèque à Paris et j'ai vu qu'il est encore en vente sur Decitre.]
Bonus - Crying in H Mart de Michelle Zauner
Je me suis rendue compte en rangeant ma bibliothèque que je ne vous avais jamais parlé de Crying in H Mart de Michelle Zauner. J'ai lu le bouquin il y a plus d'un an, donc je suis désolée si je ne suis pas hyper précise. Mais j'ai gardé un très bon souvenir de ce récit autobiographique, qui est peut-être le seul roman que j'ai réussi à lire en 3 ans - les abonné(e)s payants savent que je traverse une sorte de crise de lecture m'empêchant de lire autre chose que de la SF 😅
En voyant le livre mentionné dans plusieurs listes de "Best food books", je m'attendais à ce qu'il parle surtout de cuisine coréenne, mais c'est faux. Crying in H Mart est avant tout un livre sur le deuil - la mère de l'autrice est décédée prématurément des suites d'un cancer. Mais même si je m'attendais à autre chose en achetant le livre, je l'ai quand même beaucoup aimé. Je me souviens d'un livre touchant et plutôt juste, pas dénué d'humour, très agréable et apaisant à lire malgré la tristesse de son sujet.
Et la nourriture reste un joli fil rouge le long de la lecture : elle est évoquée comme témoignage d'amour inconditionnel d'une mère pour sa fille, mais aussi comme le moyen pour cette dernière de retrouver sa mère en son absence. Et puis les amateur(e)s de cuisine coréenne seront ravis de retrouver des descriptions de plats bien connus... Ainsi qu'un joli passage sur notre reine incontestée de la cuisine coréenne, à savoir Maangchi !
Si vous avez envie d'avoir un aperçu du style de l'autrice, vous pouvez lire cet article sur le New Yorker qui est à quelques tournures de phrases près le premier chapitre du livre, que j'avais beaucoup aimé. Et vous pouvez aussi consulter cette critique bien plus détaillée chez Bible Urbaine.
Vous avez aimé cette newsletter ? N'hésitez pas à la partager autour de vous ou à la transférer directement par e-mail :)
Partager la newsletter (scrollez à la fin)
Et si souhaitez lire encore plus d'articles et soutenir mon travail, n'hésitez pas à vous abonner à la version payante - à partir de 4.90 euros par mois :)
M'abonner à la version payante
Le mot de la fin
J'espère que cette newsletter vous a plu !
Je vous retrouve dans deux semaines pour un article de coulisses, le premier du genre !
Et je retrouverai les abonné(e)s payants la semaine prochaine, pour une autre pépite de bibliothèque, mais qui, promis, est toujours disponible à la vente 😄
Bonne lecture et amusez-vous bien en cuisine, comme d'habitude !
Des bises,
Marjorie
A noter que les liens vers leslibraires.fr sont des liens affiliés, et me permettront d'obtenir une petite commission si vous achetez des livres via ces liens :)