[News] Du bánh cuốn, un koulibiak étoilé et la langue de Shakespeare
Bref, mes projets pour 2022 pour la newsletter ✌️
A quelques jours du 24 décembre :
Maman : “Tu veux manger quoi à Noël ? Tu veux qu’on commande au restaurant du village ? Cette année, elle propose du bœuf en feuilleté sauce Périgueux, du magret de canard…
Moi : Non non c’est bon, ça fait deux semaines que je manipule des kilos de foie gras au boulot, ça m’a passé l’envie de manger des produits de luxe.
Maman : Bah tu veux manger quoi alors ?
Moi : A la limite, je m’en fous du repas de Noël, on peut faire un truc simple pour ne pas se prendre la tête. Une raclette par exemple, comme on n’en a pas encore mangé ensemble cette année. Mais j’ai surtout envie de manger du bánh cuốn, du cơm tam bảo et le poulet avec la fondue au vinaigre.
Maman : Mais ça n’existe pas ta version poulet du bò nhúng giấm !
Moi : Mais je préfère manger du poulet, c’est pas grave si c’est pas du bœuf. On peut manger ça alors ?”
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Et c’est comme ça que cette année, j’ai attendu avec encore plus d’excitation les repas d’après-Noël. Et pas parce que j’aurais évité les discussions gênantes lors du traditionnel repas de famille : mon compagnon et moi étant enfants uniques, le dîner de réveillon se compose généralement, à quelques exceptions près, de mes parents, ma belle-mère, mon compagnon et moi. Donc pas de risque d’être assise à côté d’un oncle raciste ou me demandant pour la 15e fois pourquoi je n’ai toujours pas d’enfant et “si on sait comment faire” 😑
Non, j’ai juste trépigné d’impatience à l’idée de manger ces plats vietnamiens que seule ma maman sait faire et qu’il faudra bien qu’un jour j’apprenne auprès d’elle - tout comme les ourlets aux pantalons tiens.
Mais une part de moi sait que si je laisse trainer, c’est parce que je ne veux pas que ces plats se banalisent dans mon quotidien - par contre, je n’ai évidemment aucune excuse pour les ourlets 😅 En ne pouvant les déguster que chez mes parents, ils restent un peu exceptionnels, un mélange de plaisir précieux et de sentiment d’être à la maison.
Mon palais doit beaucoup à mes parents, qui ont toujours donné libre-cours à leur curiosité dans des Carrefour et des Leclerc, tout en me faisant goûter à la cuillère de la sauce nuoc mâm quand j’étais tout bébé - ainsi que le raconte la légende !
Encore cette année, on a donc oscillé entre raclette, vin chaud, saumon fumé, escargots de Bourgogne, la bûche gigantesque du boulanger du village qui, pour la modique somme de 20 euros et quelques, faisait genre 40 cm de long - j’exagère à peine ! et tous ces plats vietnamiens qui me font tellement envie quand je rentre chez mes parents.
Le petit encart bouffe Viêt :)
Le bò nhúng giấm est une fondue à base d’un bouillon très vinaigré dans lequel on trempe des lamelles de bœuf, qui sont ensuite roulées dans des galettes de riz avec des herbes aromatiques et des crudités comme de la salade ou du concombre. C’est délicieux et en même temps assez diététique - si du moins vous faites ma version poulet d’hérétique.
Le cơm tam bảo est peut-être plus connu en France sous le nom de riz aux trois trésors, les trois trésors étant une omelette à la vapeur, du porc grillé et une préparation à base de porc rôti et de… La couenne de porc déshydratée découpée en filaments qu’on trempe dans de l’eau pour la réhydrater ! C'est chelou dit comme ça, mais promis, qu'est-ce que c'est bon !
Enfin, le bánh cuốn est à mi-chemin entre la crêpe et le ravioli, et est constitué d’une galette enroulée à base de farine de riz, avec entre autres du porc haché et des champignons noirs, et noyée dans du nuoc mâm. En me relisant, je me dis que ma description ne donne pas foncièrement envie, mais que vous dire si ce n’est qu’il faut absolument goûter ce plat au moins une fois dans votre vie ?
Pour ceux qui auraient envie d'essayer à la maison, mes deux ressources favorites en ligne en cuisine vietnamienne, La Kitchenette de Miss Tâm et Helen's Recipes (en anglais), proposent leurs versions des 3 plats. Je dis leurs versions, parce que je suis certaine qu’au-delà des bases, il y a autant de façons de faire et de “recettes magiques” que de cuisiniers et cuisinières !
A part la fondue, ce sont des plats un peu longs à faire. Donc si vous ne voulez pas vous prendre la tête, vous pouvez goûter notamment le bánh cuốn et le cơm tam bảo à Pho 13 et Pho Bom dans le 13e à Paris, si du moins ils n’ont pas changé leur menu depuis deux ans.
Quel rapport avec la newsletter alors ?
A l’image de ce que je mange chez moi et chez mes parents, attendez-vous donc à retrouver pour les futures éditions de Des Pages en Cuisine le même joyeux bazar éclectique, où on saute des milliers de kilomètres du nord au sud et en double-salto arrière d’est en ouest ; où on oscillera entre de la cuisine maison sans prétention, des spécialités traditionnelles et des tentatives vers de la gastronomie parfois estampillée Michelin - oui, carrément !
Ca ne fait que quelques mois que j’ai démarré cette newsletter, mais déjà, à ma grande surprise, elle me permet de repousser mes limites, de raccorder des wagons, et me donne envie de plus en plus de lier la confidence - comme dans la newsletter d’aujourd’hui - et la chronique plus posée. Mais est-ce finalement si surprenant quand on mélange le livre et la cuisine, deux choses profondément intimes et avec lesquels chacun entretient une relation toute personnelle ?
J’espère en tout cas que ces orientations vous plairont :-)
Et les projets pour 2022 ?
Au-delà des habituelles chroniques de livres de cuisine, je vais aussi lancer trois séries thématiques qui s’étaleront sur toute l’année 2022 (suis-je excitée à l’idée de ces trois séries ? OUI) :
Une série intitulé “J’apprends à aimer faire des gâteaux” : des chroniques de livres de pâtisseries/desserts, où j’y mettrai le moins de mauvaise foi possible quand on est une personne encore capable de rater de bêtes gâteaux au chocolat sans aucune raison et que ça soûle 95% du temps de faire de la pâtisserie 😅
Une série consacrée au livre Karen Torosyan, Secrets et techniques d’un cuisinier orfèvre, que Papa Noël vient de m’offrir 😄 L’idée : rédiger un article pour chaque plat réalisé, sur comment ce sera déroulée la réalisation de la recette et le résultat obtenu, comme ce sera la première fois de ma vie que je m’attaquerais à des recettes aussi complexes. Ma ligne de mire : le koulibiak, qui en plus des 3 pages de recette, se targue d’une bonne quinzaine de pages d’explications de technique et de montage, ça promet !
Je n’ai évidemment pas choisi ce livre par hasard, c’est un clin d’œil à ma reconversion actuelle en charcuterie. En plus d’avoir été récompensé d’une étoile Michelin, le chef d’origine arménienne est surtout connu pour ses incroyables pâtés-croûte. J’adorerais tenter notamment le fromage de tête, mais j’essaierai aussi un ou deux plats moins charcutiers et plus “classiques”, comme peut-être le tartare de bœuf ou la pintade demi-deuil et purée de topinambours.
J'espère que ça ne sera pas trop l'échec dans la confection de ces plats à 15 000 étapes, ce serait la honte pour ma reconversion - et un drame pour le portefeuille vu le coût probable des ingrédients 😅 Mais quoiqu'il arrive, j'espère qu'on s'amusera bien, moi à réaliser et écrire, et vous à me lire :-)
Et enfin, une série consacrée aux “Best cookbooks of the year” du New Yorker, où je m’engage à tester les 10 livres de la liste, dussé-je terminer mon défi en 2025. Si vous n’avez pas encore vu la liste, je vous invite à la découvrir de suite. La sélection signée Helen Rosner est incroyablement alléchante, d’une diversité dingue tant en termes de spécialités, de pays, de régimes alimentaires ou d’écriture engagée. En parcourant la sélection, j’ai eu de suite l’idée de cette série, sorte de porte d’entrée à cet aspect de l’édition culinaire anglo-saxonne qui me fascine : leur habile manière d’entrelacer recettes, parcours personnel, explorations culturelles et des réflexions ouvertement politiques et socialement engagées.
Ce qui me permet de rebondir sur un autre projet pour 2022 : proposer une version en anglais de cette newsletter. J’avais déjà eu le plaisir de tenir un compte Instagram en anglais, certes sur un sujet beaucoup plus “inoffensif” que sont les puzzles. Mais c’était excitant de pouvoir échanger autour d’une passion commune avec des personnes venant d’Australie, de Malaisie ou du Canada. Au-delà du plaisir de discuter avec des personnes du monde entier, ça rajoute une couche de défi supplémentaire pas inintéressante : comment m’exprimer auprès de publics variés sur un sujet - la bouffe - qui peut provoquer, mine de rien, de sacrés coups de sang ? Hâte de m’y essayer !
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Voilà pour les projets pour 2022 ! J’ai plein d’autres idées en tête : des hors-série sur des essais sur la bouffe ou même des livres qui n’ont rien à voir comme des romans - merci à la lectrice qui m’a suggéré cette idée, j’espère qu’elle se reconnaîtra :-) ; des interviews d’auteurs, photographes culinaires, éditeurs et traducteurs ; des listes en pagaille comme ma wishlist de Noël ; voire même un club de lecture !
Est-ce que je pourrai un jour vous proposer tout ça ? Ca dépendra évidemment de si je continue à fournir un travail suffisamment intéressant pour que vous ayez envie d’ouvrir cette newsletter. Et puis si vous êtes un jour assez nombreux pour que je puisse faire de cette missive bimensuelle plus qu’un side project cuisiné et rédigé entre 21h et 2h du matin… En tout cas, je ferai tout mon possible pour !
En attendant, je vous souhaite à l’avance une très belle année 2022, qu’elle soit pleine de merveilleux moments en cuisine ou dans le canapé, à tourner les pages d’un livre et à imaginer des saveurs nouvelles.
Merci encore d’être là et rendez-vous mercredi 5 janvier pour la première chronique de 2022 consacré au premier épisode de la série sur les livres de desserts !
Bien à vous,
Marjorie
Ps. Comme d’hab’, n’hésitez pas à me suivre sur Instagram :-)
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Et bien, les projets 2022 s’annoncent très très intéressants, hâte de découvrir tout ça !